Ce soir, c'était comme les autres, les autres soirs. Les enfants étaient déjà couchés quand il est rentré. Il est allé les embrasser. C'est un bon père, il aime nos enfants. Je sais que ça lui manque, de ne pas pouvoir passer plus de temps avec eux. Dès qu'il le peut, il s'en occupe. Alors le soir quand il rentre, il va les voir, dans leurs chambres. Il remonte la couette qui a déjà bougé, recouvre leurs petits pieds, pour pas qu'ils n'aient froid. Il les embrasse, chacun, sur le front, doucement, passe sa main dans leurs cheveux. Il éteint la lumière que je laisse allumée pour qu'ils s'endorment. Et sans faire de bruit, il referme la porte.
Alors on est tous les deux. Je suis dans la cuisine. Je prépare le dîner, comme tous les soirs. Comme tous les soirs il est crevé. Il ne veut pas parler. Je lui demande comment s'est passée sa journée. Mais comment pourrait-elle bien se passer? La journée à bosser, la journée à s'épuiser, pour des cons, passez-moi l'expression, comme un con, un con qu'il est à pas se révolter. Son travail, il ne l'aime pas, mais il ne veut pas en changer. Parce que moi je ne travaille pas. Alors s'il change, s'il veut changer, mais qu'il ne trouve rien, comment on va vivre? Comment on va faire, avec les enfants, la maison, et tout ce que moi je veux?
Mais moi je ne veux rien, moi je ne demande rien, moi je suis heureuse
comme ça. Je veux juste être avec mes enfants, avec lui. Alors je me
tais.
Il me
regarde. Je le sais. Je ne le vois pas, je lui tourne le dos, je prépare le dîner.
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